Quand Saint-Gobain se rapproche des solutions terre
Pour répondre aux nouvelles exigences environnementales de la construction en France, les entreprises tendent à intégrer le réemploi dans leur gamme de produit.
L’entreprise Saint-Gobain suit cette tendance du réemploi et a présenté en juillet 2022 un nouveau produit terre utilisant la terre d’excavation. La terre excavée est un déchet de la construction, ainsi la réemployer est une solution qui peut s’avérer être viable au long terme. En effet, nous savons aujourd’hui que la terre présente de nombreux atouts thermiques, hygroscopiques et accoustiques, que l’on cite sur notre page PISE.
Comment Saint-Gobain propose de réemployer cette terre ?
Saint-Gobain propose de réemployer cette terre sous la forme d’un remplissage terre par l’intérieur des maisons à ossature bois, un remplissage mis en place par projection. Cela crée alors un mur en terre banchée.
Ce matériau terre, issu du réemploi, est-il durable ?
Quand on se penche un peu plus sur le procédé de mise en place du produit et donc de sa composition, cela peut susciter en nous beaucoup de questionnement !
Il faut savoir qu’un bon enduit terre a seulement besoin d’un ajout d’agrégats et d’eau car elle possède naturellement le meilleur des liants : l’argile. De la chaux en faible quantité peut être également rajoutée en tant que “liant” et sa présence n’altéra pas la capacité de la terre a être réemployée.
Alors pourquoi Saint-Gobain ajoute-t-il à la composition de sa terre d’autres liants ?
Pour pouvoir projeter la terre, cette technique de mise en forme nécessite une adjonction d’un liant, très souvent chimique. Comme la terre seule ne peut être projetée car sa teneur en argile la rend trop collante, il est essenciel de mélanger à la terre des liants transformés et polluants, tels que le ciment ou une résine. Mais Saint-Gobain ne nous précise pas lesquels il emploie spécifiquement, bien qu’il se vante d’utiliser des liants bas-carbone issus du réemploi eux aussi .
La terre est un matériau qui peut se recycler à l’infini, à condition de mélanger avec la terre que des matériaux d’origine naturels, tels que des granulats, des fibres végétales ou de la chaux. Ajouter à la terre un ciment ou une résine et la terre deviendra un matériau transformé non recyclable.
Réemployer la terre est une solution viable au premier abord. Mais l’industrie ne peut s’empêcher de la transformer et d’en faire un matériau épuisable.
En quoi la composition de ce matériau transformé est-elle imcomplète ?
L’excavation de la terre est un déchet de la construction. Mais il faut faire très attention que cette terre ne soit pas issue des sites et sols pollués. Le problème avec Saint-Gobain et leur nouveau produit, c’est qu’il crée un mélange de plusieurs terres, avec différents taux d’argiles, et qu’il est impossible aujourd’hui d’avoir une tracabilité de cette terre. Bien que Saint-Gobain jure de sélectionner les terres issues de gisements fiables, rien n’est vérifiable.
Que pouvons-nous en conclure ?
Comme nous avons pu le voir ci-dessus, pour le moment les produits Terre issus de l’industrie ne sont pas forcément viables sur le long terme, d’un point de vue cycle de vie (ACV). Il reste examiner de plus près cette terre, notamment sa teneur en métaux, en hydrocarbure et en tout autre polluant.
Bien que Saint-Gobain essaye de faire de réel progrès pour être bas-carbone, il faut encore rester vigilant sur leurs méthodes et leurs produits, afin que leur intention d’être plus propre ne se transforme pas en greenwashing. Egalement, il faut craindre le fait qu’ils soient suffisamment compétitifs en terme de prix pour freiner, voir stopper toute autre solution plus vertueuse…
Notons que…
L’industrie essaye à la fois de faire des efforts pour répondre aux exigences environnementales et d’innover dans le secteur de la construction. Nous pouvons que saluer cette initiative. Malheureusement, le résultat semble manquer de profondeur pour respecter davantage les exigences et les enjeux de préservations environnementales.
Le matériau terre abrite l’homme depuis des millénaires, et ce aux quatres coins du monde. Ne gâchons pas ce matériau ancestral qui a encore beaucoup d’avenir.